Le Taekwondo ITF : version “originelle” du Taekwondo ?

Publié le 16/02/2018
Mis à jour le 04/12/2023

Art martial coréen vieux de plus de 20 siècles, le Taekwondo connaît aujourd’hui une grande popularité. Réputé pour ses techniques impressionnantes de jambes, il est…

Art martial coréen vieux de plus de 20 siècles, le Taekwondo connaît aujourd’hui une grande popularité. Réputé pour ses techniques impressionnantes de jambes, il est pratiqué par plus des millions d’adhérents répartis sur les 5 continents et est devenu sport olympique depuis les J.O de Sydney en 2000. A ce titre, beaucoup le connaissent sous sa “forme” olympique. Mais saviez-vous qu’en réalité, le Taekwondo couramment pratiqué chez nous en France ou en Europe a un cousin ? Son nom : le Taekwondo ITF.

Un peu d’histoire…

C’est le 11 avril 1955 que l’appellation “Tae Kwon Do” voit le jour et est officiellement fondé par le Général Choi Hong Hi, suite à la fin de l’occupation  de l’armée japonaise en Corée, qui y a répandu principalement l’enseignement du Karaté.

Ayant pratiqué le Taekkyon durant son jeune âge, Choi part faire ses études au Japon et découvre le Karaté, sous l’enseignement de Maître Funakoshi. A son retour au pays, il décide de développer un nouvel art martial faisant la synthèse de son enseignement et des différents arts martiaux coréens comme le Taekkyon ou le Subak-Do (dont les pratiques étaient interdites par le Japon à cette époque).

La guerre ayant éclaté, il se retrouve enrôlé puis prisonnier de l’armée japonaise avant d’être libéré.

Il ne perd en rien sa motivation de poursuivre son travail afin de redonner à la Corée un art martial national issu de sa tradition ancestrale, et en faire un symbole patriotique.

L’expansion du Taekwondo

D’un point de vue politique, le Taekwondo a beaucoup été utilisé à des fins de propagande pour faire la promotion de l’art et des traditions coréennes, face à une armée japonaise colonisatrice, voulant à tout prix imposer sa culture et son histoire.

Sous l’impulsion du gouvernement coréen et en particulier du président Syngman Rhee, le Général Choi se voit confier la principale responsabilité de développer ce nouvel art martial ainsi fondé.

Il dirige à ce moment plusieurs écoles militaires d’arts martiaux. Petit à petit, il impose progressivement le terme “Taekwondo” à toutes les écoles du pays qui se regroupent alors au sein de la KTA : Korea Taekwondo Association.

La première étape sera de promouvoir le Taekwondo, principalement en dehors des frontières…

Et cela commencera par plusieurs pays voisins comme le Viet-Nam, Taïwan ou encore la Malaisie, où il y sera nommé ambassadeur.

ITF vs. WTF : une querelle politique et idéologique

L’histoire ancestrale du Taekwondo étant liée à l’histoire de son pays la Corée, sa “scission” l’est tout autant !

Depuis la fin des années 60, deux fédérations principales co-existent : l’International Taekwondo Federation (ITF) et la World Taekwondo Federation (WTF), rebaptisée il y a quelques semaines en WT (World Taekwondo).

 

Cette séparation bien distincte sur le plan sportif qu’idéologique a été le fruit d’une querelle culturelle et politique.

En 1966, le Général Choi ne fait pas l’unanimité auprès des autres leaders d’écoles d’arts martiaux, qui voient d’un mauvais œil sa vision et son influence. Sous la pression de ceux-ci, Choi décide alors de quitter la KTA, et de fonder sa propre fédération : l’International Taekwondo Federation ou ITF. Qualifiant son art martial comme “sport national de la Corée”, il poursuit sa tournée dans de nombreux pays du monde.

Il est contraint à l’exil en 1966, notamment en raison du gouvernement sud-coréen qui désapprouve son choix de faire une démonstration en Corée du Nord. Il transfère alors le siège de l’ITF au Canada, à Toronto, afin de ne pas perdre le leadership.

Pendant ce temps, la KTA poursuit son travail de développement de “sa” vision du Taekwondo avec notamment l’enseignement d’un tronc commun. De la même manière que le Général Choi, le gouvernement sud-coréen souhaite garder le contrôle sur cet art martial devenu propagande nationale. Il fonde alors la WTF ou World Taekwondo Federation, et décide de donner un tout autre style au Taekwondo originel en le rendant davantage “sport de combat” plutôt que “art martial”…

Quelles différences entre ITF et WTF ?

Dans un divorce, c’est souvent l’avenir des enfants qui est concerné…

De la même manière, avec 2 “Taekwondos” qui ont grandi malgré le divorce de leurs “parents”, il va de soi que chacun des 2 arts a fait son bout de chemin et poursuivi son évolution… Voire son ascension.

Sur le plan général

Le Taekwondo WTF a suivi la voie de l’Olympisme. C’est ce qui l’a fait mondialement connaître. Grâce à cette version combat orientée “sport”, le Taekwondo a su se faire accepter des instances en devenant sport olympique à Sydney en 2000, après une brillante démonstration aux Jeux de Séoul. C’est aussi la plus nombreuse en termes de pratiquants.

Le Taekwondo ITF reste beaucoup moins connu dans nos contrées, en raison de l’influence de la WTF envers les fédérations (comme la FFTDA). D’ailleurs, pour un novice, lorsqu’on lui “ITF” c’est là qu’il réalise que SON taekwondo est du “WTF”. Le Taekwondo ITF a surtout poursuivi son développement et ascension aux Etats-Unis, au Canada ou encore en Corée du Nord

Sur le plan technique / vestimentaire

Nous allons plus aborder le style combat de compétition.

C’est là que se constate la réelle différence, car à la base de cette scission, c’était l’idéologie, la vision et le style technique dont il était question.

Le Taekwondo ITF est souvent considéré par beaucoup comme étant LE Taekwondo “traditionnel” ou “original”, surtout avec un style WTF qui met beaucoup plus en avant le style « sportif ».

Là où le style WTF s’est beaucoup édulcoré, c’est sur la partie combat. Il y a des protections sur l’ensemble du corps : casque, avant-bras, plastron, coquille, protège-tibias, gants mitaines, protèges-pieds ou “pitaines”… Une véritable armure de Robocop !

Au niveau des règles, il s’agit d’un système de points attribués par des touches au plastron ou à la tête… Une sorte “d’escrime des pieds”.

Interdiction de frapper à certains endroits… Et surtout d’utiliser ses mains/poings au visage.

Pour le style ITF, c’est un autre style, même si on y retrouve beaucoup de ressemblances avec la WTF sur la partie traditionnelle : formes, self-defense avec clés de bras, cassages, combat libre…

Pour les formes, cela ressemble beaucoup aux mouvements que nous connaissons, mais exécutés de manière plus lente et décomposée, souvent synchronisés avec l’expiration au moment de la frappe ou du blocage.

En combat de compétition, il est beaucoup plus orienté “full-contact” voire Karaté. Pas de protections “armure” et de plastron. Les frappes avec les poings sont autorisés, tout comme les pieds.

Les poings sont recouverts de gants spéciaux ressemblant à ceux en boxe anglaise.

Les doboks en ITF sont souvent recouverts de bandes noires le long des bras où des jambes, là où les doboks en WTF sont toujours blancs.

Certains doboks s’enfilent à la manière des kimonos japonais.

Mon avis

Nous pratiquons aujourd’hui 2 taekwondos différents, portant la même appellation. J’avoue que j’ai toujours été intrigué par ce Taekwondo ITF. Avec le recul et la pratique, je me dis que c’est assez dommage cette triste histoire, notamment quand on constate que la politique et l’idéologique ont joué beaucoup dans l’histoire du Taekwondo.

Personnellement, je n’ai jamais aimé le combat de compétition “WTF”, surtout depuis que je l’ai découvert aux Jeux Olympiques (qu’il est lamentable de voir 2 adversaires se regarder pendant 3 minutes ne sachant qu’utiliser un seul pied pour le bandal tchagui…).

Mais lorsque j’ai vu le ITF, je vois qu’il y a plus de contact, de réalisme et d’efficacité en compétition. Je suis content de voir que dans le Taekwondo, on utilise finalement ses poings.

Je détestais aussi perdre 5 minutes à chaque entraînement à enfiler l’ensemble de mes protections et me retrouver mal à l’aise durant un combat, serré comme une sardine et amoindri dans mes mouvements.

Lorsque je venais à faire des Kyorougui, je laissais souvent le plastron de côté, pour me sentir plus libre et plus léger dans mes mouvements…

J’ai toujours aimé les entraînements combat avec plus de “contact”… Mais bon c’est mon opinion, et pas forcément celle de qqn d’autre.

J’en viens donc à me dire que, finalement, l’art martial que l’on adopte… C’est avant tout celui qui nous ressemble 😉

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